En quoi l’État est-il nécessaire ?
Thomas Hobbes
De cette égalité des aptitudes
découle une égalité dans l’espoir d’atteindre nos fins. C’est pourquoi, si deux
hommes désirent la même chose alors qu’il n’est pas possible qu’ils en
jouissent tous les deux, ils deviennent ennemis : et dans leur poursuite de
cette fin (qui est, principalement, leur propre
conservation, mais parfois seulement leur agrément), chacun s’efforce de
détruire ou de dominer l’autre. Et de là vient que, là où l’agresseur n’a rien
de plus à craindre que la puissance individuelle d’un autre homme, on peut
s’attendre avec vraisemblance, si quelqu’un plante, sème, bâtit, ou occupe un
emplacement commode, à ce que d’autres arrivent tout équipés, ayant uni leurs forces, pour le déposséder et lui
enlever non seulement le fruit de son travail, mais aussi la vie ou la liberté.
Et l’agresseur à son tour court le même risque à l’égard d’un nouvel agresseur.
Du fait de cette défiance de l’un
à l’égard de l’autre, il n’existe pour nul homme aucun moyen de se garantir qui
soit aussi raisonnable que le fait de
prendre les devants, autrement dit, de se rendre maître, par la violence
ou par la ruse, de la personne de tous les hommes pour lesquels cela est
possible, jusqu’à ce qu’il n’aperçoive plus d’autre puissance assez forte pour
le mettre en danger. Il n’y a rien là de plus que n’en exige la conservation de
soi-même, et en général on estime cela permis. Également, du fait qu’il existe
quelques hommes qui, prenant plaisir à
contempler leur propre puissance à l’œuvre dans les conquêtes, poursuivent
celles-ci plus loin que leur sécurité ne le requiert, les autres, qui autrement
se fussent contentés de vivre tranquilles à l’intérieur de limites modestes, ne
pourraient pas subsister longtemps s’ils n’accroissaient leur puissance par
l’agression et s’ils restaient simplement
sur la défensive. En conséquence, un tel accroissement de l’empire d’un
homme sur les autres, étant nécessaire à sa conservation, doit être permis.
De plus, les hommes ne retirent
pas d’agrément (mais au contraire un grand déplaisir) de la vie en compagnie,
là où il n’existe pas de pouvoir capable de les tenir tous en respect. Car
chacun attend que son compagnon l’estime
aussi haut qu’il s’apprécie lui-même, et à chaque signe de dédain, ou de
mésestime il s’efforce naturellement, dans toute la mesure où il l’ose (ce qui
suffit largement, parmi des hommes qui n’ont pas de commun pouvoir qui les
tienne en repos, pour les conduire à se détruire mutuellement), d’arracher la
reconnaissance d’une valeur plus haute : à ceux qui le dédaignent, en leur
nuisant ; aux autres, par de tels exemples.
De la sorte, nous pouvons trouver
dans la nature humaine trois causes principales de querelle : premièrement, la
rivalité ; deuxièmement, la méfiance ; troisièmement, la fierté.
La première de ces choses fait
prendre l’offensive aux hommes en vue de
leur profit. La seconde, en vue de leur sécurité. La troisième, en vue
de leur réputation. Dans le premier cas, ils usent de violence pour se rendre
maîtres de la personne d’autres hommes, de leurs femmes, de leurs enfants, de
leurs biens. Dans le second cas, pour défendre ces choses. Dans le troisième
cas, pour des bagatelles, par exemple pour un mot, un sourire, une opinion qui
diffère de la leur, ou quelque autre signe de mésestime, que celle-ci porte
directement sur eux-mêmes, ou qu’elle rejaillisse sur eux, étant adressée à
leur parenté, à leurs amis, à leur nation, à leur profession, à leur nom.
Il apparaît clairement par là
qu’aussi longtemps que les hommes vivent sans un pouvoir commun qui les tienne
tous en respect, ils sont dans cette contre chacun.
Thomas Hobbes p. 122-124.
Le système de Hobbes repose sur un double postulat.
Les hommes sont égoïstes et ne recherchent que leur satisfaction individuelle.
Ils sont égaux car le plus faible peut menacer la sécurité du fort. Ce qui
caractérise l’état de nature, c’est donc la méfiance mutuelle et la guerre de
tous contre tous qui menace la survie même de l’espèce. Il faut donc instaurer
un pacte par lequel chacun s’engage à se démettre du droit d’utiliser sa force
au profit d’un tiers terme qui ne contracte pas et qui devient seul à pouvoir
légitimement exercer la violence : l’État. L’État serait donc nécessaire pour
assurer la paix sociale : chaque sujet accepte d’aliéner sa liberté au profit
de l’État, si ce dernier peut lui assurer la sécurité
Rousseau formule
deux objections : d’abord, Hobbes suppose une nature humaine alors qu’il n’y a
pas d’homme « naturel ».
Ensuite, la question est de savoir s’il est légitime
de mettre ainsi en balance la liberté et la sécurité
John Locke
Pour locke , l’état de nature est un état de paix, de
bonne volonté, d’assistance mutuelle et de conservation, et qui comporte pour
les hommes des obligations et des droits découlant de la loi naturelle. Il y
manque seulement une autorité commune et c’est pour établir cette autorité que
les hommes concluent le contrat social et se constituent en corps. Ils
confèrent au corps social les pouvoirs nécessaires à la poursuite de ses
fins : le bien commun et la protection des droits naturels, parmi lesquels
Locke fait figurer en bonne place le droit de propriété. Mais comme le pouvoir
ne peut être exercé par le peuple constitué en corps, celui-ci doit instituer
un pouvoir législatif qui sera le pouvoir suprême. Cette institution n’est
cependant pas le résultat d’un contrat. Elle est un trust, ce qui implique au
minimum que le peuple peut se révolter lorsque le pouvoir n’est pas exercé
conformément au trust. Tel est le sens de la révolution anglaise de 1688, que
Locke, théoricien whig, désire justifier. De plus, à cette garantie externe,
s’ajoute une garantie interne : pour que le pouvoir législatif ne soit pas
exercé au détriment des droits naturels des minorités ou d’une classe
particulière, il importe qu’il soit mixte, c’est-à-dire composé, comme dans
l’Angleterre de Locke, d’un élément démocratique (les représentants élus du
peuple ou Chambre des communes), d’un élément aristocratique (les lords) et
d’un monarque, et qu’aucune décision ne puisse être adoptée sans que chacune de
ces trois catégories ait donné son consentement. Ainsi véritablement, en
renonçant à la liberté de l’état de nature, l’homme n’a pas renoncé au
gouvernement de lui-même, puisque aucun de ses droits et aucun de ses intérêts
ne peuvent être violés sans son accord
Jean Jacques Rousseau
Texte de rousseau
« Ce que l’homme perd par le
contrat social, c’est sa liberté naturelle et un droit illimité à tout ce qui
le tente et qu’il peut atteindre ; ce qu’il gagne, c’est la liberté civile et
la propriété de tout ce qu’il possède. Pour ne pas se tromper dans ces compensations,
il faut bien distinguer la liberté naturelle, qui n’a pour bornes que les
forces de l’individu, de la liberté civile, qui est limitée par la volonté
générale, et la possession, qui n’est que l’effet de la force ou le droit du
premier occupant, de la propriété, qui ne peut être fondée que sur un titre
positif.
« On pourrait sur ce qui précède ajouter à l’acquis de l’état civil la
liberté morale, qui seule rend l’homme vraiment maître de lui ; car l’impulsion
du seul appétit est esclavage, et l’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite
est liberté. »
Explication du texte
« L’homme est né libre, et partout il est dans les fers.
Tel se croit le maître des autres, qui ne laisse pas d’être plus esclave
qu’eux. Comment ce changement s’est-il fait ? Je l’ignore. Qu’est-ce qui peut
le rendre légitime ? Je crois pouvoir résoudre cette question. »
Jean Jacques
Rousseau la résout, , par la théorie du
contrat social, il institue le peuple en
même temps que la souveraineté
Le contrat social
c’est le passage de la liberté naturelle (faire ce que je veux et peux)
à la liberté civile (faire ce que je veux et que la loi n’interdit pas)
Rousseau dit mieux que personne : Par le contrat
social, « chacun, s’unissant à tous, n’obéit
pourtant qu’à lui-même et reste aussi libre qu’auparavant »
l’état de nature est une état de dispersion, pour Rousseau
la déférence entre Le contrat de Hobbes et celui de
Rousseau
Le contrat de Rousseau passe, non pas, comme celui de
Hobbes, entre les individus, mais entre les individus pris ut singuli (Action)
d’une part et le corps social d’autre part, et c’est ce dernier qui devient
souverain. Chaque individu renonce à l’indépendance et à tous ses droits
naturels et se soumet totalement au souverain. Mais cette soumission n’est que
le degré suprême de la liberté, car elle est une soumission à la volonté
générale et celle-ci présente certains caractères qui font qu’elle ne saurait
ni errer ni opprimer.
COURS SUR L’ÉTAT 2 Terminale ES En quoi l’État est-il nécessaire ?
Reviewed by rachman
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décembre 23, 2019
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