langage -2-
Dire n’est pas seulement parler : tout le
monde sait qu’on peut parler beaucoup et ne pas dire grand-chose (c’est le cas
du bavardage). Dire renvoie à un contenu de pensée : en ce sens dire serait par
définition conscient. « Ne pas savoir » implique au contraire une absence de
conscience. D’où le problème posé.
Le dire semble conscient : d’une part, c’est
par le dire que la pensée trouve son expression et son débouché ; d’autre part,
il y a toujours une pensée préalable à l’expression.
Le langage et l’être
Selon Heidegger C'est le langage qui
permet cette manifestation à l'homme de l'Être dans sa vérité. Le langage est
traditionnellement conçu par la philosophie comme un outil de domination sur le
monde (sur l'étant) par les concepts et les catégories logiques, Mais la véritable
essence du langage est sa relation à l'Être: avant même de dire les étants et
les signifier, le langage se définit comme écoute de l'Être, L'homme n'est pas
le maître du langage, pas plus qu'il n'est le maître de l'Être : il faut plutôt
dire que l'homme, par le langage, est celui à qui l'Être se « donne» ; la
langue allemande traduit cette idée par l'expression es gibt Sein (l'Être se
donne), Le vrai sens de l'éthique réside dans cette responsabilité: le destin
de l'homme n'est pas d'arriver à la domination technique de l'étant, mais
d'accueillir la vérité de l'Être qui se donne à lui, c'est-à-dire d'habiter
dans la proximité de l'Être,
les mots et les choses
L’homme est un être parlant. Grâce aux
mots, il exprime et communique , et l’univers des mots et celui des choses
apparaissent comme à la fois séparés et liés. Il convient de débrouiller la
complexité de leurs rapports.
L’incommensurabilité : Une chose possède une existence
objective, concrète, détachée. Le mot, en revanche, n’existe que s’il est proféré
ou écrit par un sujet. La seule matérialité du mot tient dans la vibration de l’air,
ou dans la trace d’encre – peu de chose (justement) en regard d’une chaîne de
montagnes ou d’un groupe d’étoiles.
Le cratylisme : Platon a écrit sur le rapport entre le mot et la chose un
dialogue intitulé Cratyle. On y voit exposée la conception selon laquelle le
langage serait dérivé de la réalité – le mot (le signe) serait le reflet du référent.
Ainsi, à l’origine, les mots seraient des onomatopées (le mot « kikonia » – «
cigogne » en grec – évoque le claquement du bec de cet oiseau) – en tout cas
des évocations de bruits ou de formes. Les poètes sont presque toujours
partisans du cratylisme : la « joie » a une sonorité ouverte, le mot « sec »
est sec, et « lugubre » est comme une peinture muette.
L’arbitraire : Ferdinand de Saussure, le fondateur de la linguistique
moderne, a ruiné cette conception réaliste. Les mots ne peignent pas les choses
– ils sont des signes, arbitrairement choisis (le mot « long » est plus court
que le mot « court ») pour désigner la réalité (le référent). Et « Le signe linguistique est arbitraire. Ainsi I
‘idée de sœur n’est liée par aucun rapport intérieur avec la suite de sons
s-ö-r qui lui sert de signifiant. ».À preuve de ce conventionnalisme, la
pluralité des langues. Si « cheval » se dit « horse » en anglais, c’est bien le
signe que les mots ne sont pas des images des choses. S’il est vrai que
certains mots évoquent directement une propriété de la chose (le mont Blanc a été
ainsi appelé parce qu’il est blanc), d’autres, au contraire, ont été choisis
par antiphrase (les marins superstitieux ont appelé « Pacifique » l’océan parce
que justement il ne l’était pas).
langage -2-
Reviewed by rachman
on
janvier 12, 2019
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