la liberté 2






La loi restreint-elle la liberté ?

TEXTE DE HOBBES



Mais de même que les hommes, pour se procurer la paix et par là se préser­ver eux-mêmes, ont fabriqué un homme artificiel, qu’on appelle République, ils ont aussi fabriqué des chaînes artificielles appelées lois civiles, qu’ils ont eux-mêmes, par des conventions mutuelles, attachées d’un bout aux lèvres de l’homme ou de l’assemblée à qui ils ont donné le pouvoir souverain, et de l’autre à leurs propres oreilles. Ces liens qui, par leur propre nature, n ’ont aucune force, on peut néanmoins, par l’effet du danger (mais nullement de la difficulté) qu’il y aurait à les rompre, faire qu’ils résistent.
C’est seulement par rapport à ces liens que je vais parler de la liberté des  sujets. Étant donné en effet qu’il n’existe pas au monde de République où l’on ait établi suffisamment de règles pour présider à toutes les actions et paroles des hommes (car cela serait impossible), il s’ensuit nécessairement que dans tous les domaines d’activité que les lois ont passés sous silence, les gens ont la liberté de faire ce que leur propre raison leur indique comme  étant le plus profitable. Car si nous prenons le mot de liberté dans son sens propre de liberté corporelle, c’est-à-dire de n’être ni enchaîné ni emprisonné, il serait tout à fait absurde, de la part des hommes, de réclamer comme ils le font pour obtenir cette liberté dont ils jouissent si manifestement. D’autre part, si nous entendons par liberté le fait d’être soustrait aux lois, il n’est pas  moins absurde, de la part des hommes, de réclamer comme ils le font cette liberté qui permettrait à tous les autres hommes de se rendre maîtres de nos vies. Et cependant, aussi absurde que ce soit, c’est bien ce qu’ils réclament : ne sachant pas que les lois sont sans pouvoir pour les protéger s’il n ’est pas un glaive entre les mains d’un homme (ou de plusieurs) pour faire exécuter  ces lois. La liberté des sujets ne réside par conséquent que dans les choses qu’en réglementant leurs actions le souverain a passées sous silence, par exemple la liberté d’acheter, de vendre, et de conclure d ’autres contrats les uns avec les autres ; de choisir leur résidence, leur genre de nourriture, leur métier, d’éduquer leurs enfants comme ils jugent convenable, et ainsi de suite.
Thomas Hobbes, Léviathan, 2 partie, chapitre 21, « De la liberté des sujets », p. 223-224.

QUESTIONS  POUR COMPRENDRE LE TEXTE
1. À quoi Hobbes compare-t-il les lois civiles ?
2. Pourquoi, selon Hobbes, serait-il absurde de vouloir être soustrait aux lois ?
3. Expliquez : « La liberté des sujets ne réside par conséquent que dans les choses qu'en réglementant leurs actions le souverain a passées sous silence. » Quelle est la relation entre la loi et la liberté ?
Mots clefs
La liberté : selon Hobbes, est d'abord une « absence d'opposition », d'obstacles extérieurs. Cette définition s'applique aux choses comme aux personnes : dans un vase, l'eau est contrainte ; hors du vase, elle se répand librement.
De même, « un homme libre est celui qui, s'agissant des choses que sa force et son intelligence lui permettent d'accomplir, n'est pas empêché de faire celles qu'il a la volonté de faire »
Explication du texte
Pour Hobbes, le sens premier de la liberté est la liberté de mouvement. Si les lois empêchent les hommes d'accomplir certaines actions
Et si la liberté le fait d’être soustrait aux lois, cependant les lois exigent le  pouvoir pour les protéger par une autorité qui peut garantir la liberté des autres et exécuter  ces lois.


La thèse de Jean -Jacques Rousseau

« L'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté » (Jean -Jacques Rousseau , Du contrat social, 1762 ).
Rousseau veut montrer que seul un État fondé sur un pacte social est légitime. Il faut que les sujets passent une convention par laquelle ils échangent leur liberté naturelle contre une liberté civile. Par-là, ils obéissent à des lois qui incarnent leur propre volonté, générale et fondée sur la raison. Ils obéissent à eux-mêmes.
Mais cette  volonté générale est la volonté de tous ceux qui défendent leurs intérêts communs et doit être comprise comme distincte de «la volonté de tous», qui est simplement l’ensemble des volontés individuelles. "Chacun de nous met sa personne et tout son pouvoir en commun sous la direction suprême de la volonté générale et, en notre qualité d’entreprise, nous prenons  chaque membre comme une partie indivisible de l’ensemble". cette volonté générale revêt l’aspect d’une volonté personnelle, au-delà des membres de la société qui lui donnent le pouvoir. La population a le devoir d'obéir, ce qui conduit à interpréter Rousseau comme un totalitarisme tolérant. Ce qui manque souvent à cette interprétation, c’est tout d’abord l’insistance de Rousseau sur le fait que la démocratie directe qu’il prône n’est vraiment réalisable que dans les petites villes-États. En fait, Rousseau a pour modèle et idéal les villes-États de la Grèce antique connues à fois de pratiquer cette sorte de démocratie.
La liberté est-elle l’essence de l’homme ?
René Descartes

Pour Descartes, l'homme a une volonté douée de libre arbitre, c'est-à-dire de la capacité à se déter­miner elle-même indépendamment de toute contrainte  extérieure À ce titre, il distingue « la volonté » de « l'entendement » : ce que ma pensée et mon jugement me proposent (de faire ou d'accepter à titre d'idée), je peux soit le pour­suivre, soit au contraire le refuser, grâce à ma seule volonté.

Jean Paul Sartre


L'idée centrale sartrienne est que l'homme n'a pas de nature, qu'il n'est pas prédéfini comme une chose : il n'est que ce qu'il devient, à travers ses actes et son existence. Certes, l'homme est marqué par certaines « situations » qu'il n'a pas choisies (sa naissance, par exemple) et il est donc, à ce titre, enfermé comme les choses dans la « facticité » (appartenir au monde des « faits »).
Pour autant, à l'intérieur même de cette « choséité », l'homme reste, selon Sartre, totalement libre en tant que « manière d'être » ; il est en cela « transcendance », capacité de dépassement.
Si je tombe malade, par exemple, je ne peux pas choisir de ne pas être malade - cela est un fait -, mais je peux choisir ma manière d'être malade.
Refuser cette manière d'être - en disant, par exemple : « Je fais cela parce que je suis malade » - , ce serait, pour Sartre, se réfugier dans la mauvaise foi, se complaire dans la facilité consistant à poser : « Je suis ce que je suis.
En effet, la philosophie de Sartre repose sur un principe plus large: l’homme n’est jamais obligé; il est confronté à un choix à chaque tournant. Même si un homme est emprisonné ou une arme à feu à la tête, affirme Sartre, c'est à lui de choisir ou non d'obéir - les conséquences n'empêchent pas de faire ce choix.
Sartre se rend compte que cette liberté radicale a de lourdes conséquences. Nous sommes responsables de tout ce que nous faisons. Dans l’existentialisme sartrien, on ne peut ni prétexter ni reporter sa responsabilité sur un être divin ou sur la nature humaine: cela constituerait une illusion, ou une "mauvaise foi". Cela conduit à trois fardeaux liés sur l'individu. Tout d’abord, «l’angoisse», née de la prise de conscience du poids de la responsabilité que nous détenons chacun. Tout ce que nous faisons ne concerne pas seulement nous-mêmes mais, par nos choix et nos actions, nous donnons des exemples au reste de l’humanité. Sartre insiste sur le fait que cette responsabilité est une conséquence du fait que nous définissons notre propre sens de la vie, qui se reflète dans nos actions.
Lorsque nous faisons un choix, ce n'est pas simplement une préférence personnelle, mais une déclaration au monde que c'est comme cela que la vie devrait être menée. Le deuxième fardeau est l’abandon. Car nous sommes laissés seuls sans aide ni conseils en matière morale.
Troisièmement, il y a le «désespoir». Sartre signifie par-là que nous devons agir sans espoir, renonçant à notre instinct de croire que tout ira pour le mieux. Il n'y a pas de providence. Nous ne devons compter que sur ce que nous pouvons affecter par notre volonté et notre action.
Les conséquences de l’existentialisme de Sartre sont clairement lourdes mais inévitables. Nous sommes «condamnés à être libres». Mais cela ne doit en aucun cas susciter l’inquiétude, ses détracteurs l‘accusent en effet de produire une  philosophie pessimiste .
Mais Sartre répond que L’existentialisme fait preuve d’une «sévérité optimiste». Son message optimiste est que «le destin de l’homme est placé en lui-même».
Pour savoir  plus voilà des citations qui sont très utiles pour aborder ce sujet

 La définition de la liberté
 « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui »  Déclaration des droits de I ‘homme et du citoyen, 1789

La liberté n’est-elle qu’une illusion ?
( Fatum, disent les Latins : c'était dit ; mektoub, disent les  Arabes: c'était écrit..( …..) c'est le triomphe du langage)  jean marie  Domenach,
Retour au tragique, 1967
Le mot « fatalité » vient en effet du latin fatum, qui signifie  « ce qui était dit » (sous-entendu: par l'oracle). Par quoi l'on voit que le fatalisme, qui postule que la destinée de chacun est fixée d'avance, dérive des pratiques superstitieuses de la divination.

« Le sage (...) se moque du destin, dont certains font le maitre absolu des choses. »
EpicureLettre à Ménécée

« Si à un instant la roue du monde s'arrêtait et qu'il y eût là une intelligence calculatrice omnisciente pour mettre à profit cette pause, elle pourrait continuer à calculer I ‘avenir de chaque être jusqu'aux temps les plus éloignés et marquer chaque trace où cette roue passera  désormais. »
Nietzsche Humain, trop humain, 1878.

La liberté est-elle l’essence de l’homme ?

« Aucun physicien ou physiologue qui étudierait minutieusement le corps de Mozart, et tout particulièrement son cerveau, ne serait capable de prédire sa Symphonie en sol mineur d'une manière détaillée. »
Popper L'Univers irrésolu, 1982.

«  L’homme ne saurait être tantôt libre et tantôt esclave :  il est tout entier et toujours libre ou il n’est pas. Sartre L'Être et le Néant, 1943.


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